AVSONIVS TETRADIO SAL. O qui uenustos uberi facundia sales
opimas, Tetradi, cauesque, ne sit tristis et dulci carens amara concinnatio;
qui felle carmen atque melle temperans torpere musas non sinis pariterque fucas
quaeque gustu ignaua sunt et quae sapore tristia; rudes camenas qui Suessae
praeuenis aeuoque cedis, non stilo: cur me propinquum Santonorum moenibus
declinas, ut Lucas boues olim resumpto praeferoces proelio fugit iuuentus
Romula? Non tigris <ut> te, non
leonis impetu, amore sed caro expeto. Videre alumni gestio uoltus mei et
indole optata frui. Inuitus olim
deuoraui absentiae necessitatem pristinae, quondam docendi munere
adstrictum graui Iculisma cum te absconderet, et inuidebam deuio ac solo loco
opus Camenarum tegi. At nunc frequentes atque claros nec procul cum floreas
inter uiros tibique nostras uentus auras deferat auresque sermo uerberet, cur me supino pectoris fastu tumens spernis
poetam consulem, tuique amantem teque mirantem ac tua desiderantem carmina
oblitus alto neglegis fastidio? Plectendus
exemplo tuo, ni stabilis aeuo pectoris nostri fides quamquam recusantes amet. Vale.
Valere si uoles me, peruola cum scrinio et Musis tuis.
Ausone à Tetradius, salut.
Ô toi, dont la verve féconde est nourrie de charmantes
saillies ;
Tetradius, toi qui as soin que tes pages acerbes ne manquent
ni d’enjouement ni de douceur ;
qui, par un heureux
mélange du fiel et du miel en tes vers, combats la torpeur de la Muse ;
qui sais donner du
charme aux pensées d’un goût trop fade aussi bien qu’à celles d’une âcre saveur
;
toi qui surpasses
enfin les muses grossières de Suessa, et qui leur cèdes pour l’âge, non pour le
style :
pourquoi, lorsque je
suis si près des murs de Santonus, m’éviter comme autrefois la jeunesse romaine
fuyant à la vue des bœufs de Lucanie dont la furie recommençait le combat ? Ce
n’est pas un tigre, ce n’est pas un lion qui te poursuit ; c’est un tendre ami
qui t’appelle.
Je brûle de contempler
les traits de mon élève, et de jouir à souhait de son esprit.
Avec bien du regret
autrefois j’ai dévoré la nécessité de ta première absence : les dures fonctions
de l’enseignement te retenaient enfermé dans Iculisna, et je voyais avec
douleur les trésors des Muses enfouis dans ce lieu solitaire et détourné.
Mais aujourd’hui que
tu brilles au grand jour, au nombre des plus illustres hommes et non loin de
moi, aujourd’hui que le vent te porte notre haleine, et que ma voix peut
frapper ton oreille,
pourquoi, le cœur
gonflé d’arrogance et d’orgueil, mépriser ainsi le poète-consul ? Moi qui
t’aime, moi qui t’admire, moi qui aspire après tes vers, pourquoi, du haut de
tes dédains, me négliger dans l’oubli ? Je te punirais en t’imitant, si mon
cœur, toujours stable en sa foi, n’aimait encore l’ingrat malgré lui-même.
Porte-toi bien et si tu veux que je me porte bien aussi ; accours avec tes
tablettes et tes Muses.
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