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jeudi 30 décembre 2010

Mes estampes - L'Ukiyo-e (浮世絵) : définition, historique, technique



L'Ukiyo-e (浮世絵,terme japonais signifiant « image du monde flottant ») est un mouvement artistique japonais de l'époque Edo (1603-1868) comprenant non seulement une peinture populaire et narrative originale, mais aussi et surtout les estampes japonaises gravées sur bois.

Après des siècles de déliquescence du pouvoir central suivie de guerres civiles, le Japon connaît à cette époque, avec l'autorité désormais incontestée du shogunat Tokinawa, une ère de paix et de prospérité qui se traduit par la perte d'influence de l'aristocratie militaire des daimyos, et l'émergence d'une bourgeoisie urbaine et marchande. Cette évolution sociale et économique s'accompagne d'un changement des formes artistiques, avec la naissance de l’ukiyo-e et de ses estampes peu coûteuses, bien loin de l'aristocratique école de peinture Kano.

Les thèmes de l’ukiyo-e sont également tout à fait nouveaux, car ils correspondent aux centres d'intérêt de la bourgeoisie : les jolies femmes et les courtisanes célèbres, les scènes érotiques, le théâtre kabuki, les lutteurs de sumo et les lieux célèbres.


Ukiyo (浮世, « monde flottant »), dans son sens ancien, est lourdement chargé de notions bouddhiques, avec des connotations mettant l'accent sur la réalité d'un monde où la seule chose certaine, c'est l'impermanence de toutes choses. C'est là pour les Japonais un très vieux concept qu'ils connaissent depuis l'époque Heian (794-1185).
Ce mot empreint de résignation, les habitants d'Edo le reprennent au XVIIe siècle en le détournant de son sens à une époque où leur ville connaît une remarquable expansion due à son statut nouveau de capitale ainsi qu'à la paix qui règne désormais.
Le terme ukiyo apparaît pour la première fois dans son sens actuel dans Les Contes du monde flottant (Ukiyo monogatari), œuvre de Asai Ryoi parue vers 1665, où il écrit dans la préface :

Vivre uniquement le moment présent,
se livrer tout entier à la contemplation
de la lune, de la neige, de la fleur de cerisier
et de la feuille d'érable... ne pas se laisser abattre
par la pauvreté et ne pas la laisser transparaître
sur son visage, mais dériver comme une calebasse
sur la rivière, c'est ce qui s'appelle ukiyo.

Initialement, les estampes étaient exclusivement imprimées en noir et blanc à l'encre de Chine (sumi) ; plus tard, certaines estampes sont rehaussées de couleurs apposées à la main – ce qui restait coûteux – puis par impression à partir de blocs de bois portant les couleurs à imprimer, encore très peu nombreuses.

Vers 1765 les efforts conjugués de quelques artistes tels Kiyomitsu et Harunobu, et d'éditeurs comme Emiya Kichiemon (Rankôdô) ont conduit à la mise au point des techniques nécessaires aux calages successifs du papier sur plusieurs bois. Ainsi allait on passer des estampes en deux ou trois couleurs  aux planches véritablement polychromes, les nishiki-e.
   Passer à quatre ou six couleurs rendit le travail des graveurs et imprimeurs plus difficile certes, mais ceux-ci accomplirent des progrès continuels jusqu'à produire des estampes parfaitement maîtrisées, aux traits d'une finesse jusqu'alors inconnue. Ainsi dans le dessin des chevelures des femmes, dans les reliefs donnés aux planches, dans les dégradés de couleurs (bokashi) qui deviendront familiers au siècle suivant dans les paysages fameux de Hokusai et Hiroshige.


Les ukiyo-e sont abordables financièrement car ils peuvent être reproduits en grande série (de l'ordre de quelques centaines, car après trois cents exemplaires environ, le bois s'émousse et les traits deviennent moins précis). Ils sont principalement destinés aux citadins qui ne sont généralement pas assez riches pour s’offrir une peinture. Ce développement de l’ukiyo-e s'accompagne de celui d'une littérature populaire. Le sujet initial des ukiyo-e était la vie urbaine, en particulier les scènes du quotidien dans le quartier des divertissements. De belles courtisanes, des sumotoriskabuki populaires sont ainsi dépeints se livrant à des activités plaisantes pour l'œil. Par la suite, les paysages connaissent également le succès. massifs, ainsi que des acteurs de

Les racines de l’ukiyo-e, elles, remontent à l’urbanisation de la fin du XVIe siècle qui favorise le développement d’une classe de marchands et d’artisans. Ces derniers commencent à écrire des fictions et à peindre des images rassemblées dans des ehon (絵本, « livres d’images » présentant des récits illustrés) ou des romans.


Au début, les ukiyo-e sont souvent utilisés pour illustrer ces livres, mais progressivement, ils s’en affranchissent grâce aux épreuves réalisées sur une feuille volante ichimai-e ou aux affiches gravées pour le théâtre kabuki. Les sources d’inspiration sont à l’origine les contes et les œuvres d'art chinois. Mais les plaisirs offerts par la capitale sont de plus en plus présents, et les guides touristiques, ceux du  Yoshiwara par exemple, sont eux aussi populaires et largement répandus, puisque Moronobu édite son Guide de l'amour au Yoshiwara (吉原恋の道引, Yoshiwara koi no michibiki) dès 1678 ; on voit même apparaître à la fin du XVIIIe siècle une véritable encyclopédie du monde des plaisirs, Le Grand Miroir de la voie de l'amour (色道大鏡, Shikidō ōkagami), de Kizan Fujimoto (藤本箕山, Fujimoto Kizan)


  La technique de l'estampe

Les épreuves d’estampes ukiyo-e sont produites de la manière suivante
  1. l’artiste réalise un dessin-maître à l’encre, le shita-e ;
  2. l’artisan graveur colle ce dessin contre une planche de bois (cerisier ou catalpa), puis évide à l'aide de gouges (marunomi) les zones où le papier est blanc, créant ainsi le dessin en relief sur la planche, mais détruisant l’œuvre originale au cours de ce processus ;
  3. la planche ainsi gravée (« planche de trait ») est encrée et imprimée de manière à produire des copies quasiment parfaites du dessin original ;
  4. ces épreuves sont à leur tour collées à de nouvelles planches de bois, et les zones du dessin à colorer d’une couleur particulière sont laissées en relief. Chacune des planches imprimera une couleur dans l’image finale. Ce sont les « planches de couleurs » ;
  5. le jeu de planches de bois résultant est encré dans les différentes couleurs et appliqué successivement sur le papier. Le parfait ajustement de chaque planche par rapport au reste de l'image est obtenu par des marques de calage appelées kento. L'encrage est obtenu en frottant le papier contre la planche encrée à l'aide d'un tampon baren en corde de bambou.

 
L’impression finale porte les motifs de chacune des planches, certaines pouvant être appliquées plus d’une fois afin d’obtenir la profondeur de teinte souhaitée.

La fabrication d'une estampe japonaise ne fait pas seulement intervenir l'artiste, c'est une oeuvre collective ; le dessin qu'il a réalisé n'est que la première étape d'un processus complexe, faisant appel à plusieurs intervenants (l'artiste, l'éditeur, le(s) graveur(s), le ou les imprimeurs).
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   Cette technique a aussi connu une évolution profonde des formats employés. Ceux ci résultent à la fois des contraintes techniques de l'impression et de la manière de couper les feuilles de papier. Celles ci étant "normalisées", les estampes sont en général de même format.
   Dans les années 1760/80, l'hosoban, environ 33 x 14,5 cm a été le plus employé; mais on trouve aussi des hashira-e, environ 73x12 cm, et des chuban, environ 26 x 19 cm. Plus tard le format oban devient plus utilisé, environ 38x25,5 cm, et éclipsera les autres formats au 19e siècle. Certains oban sont légèrement plus grands, mais on trouve aussi des aiban, plus petits, environ 34 x 22,5 cm.

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